Premiers pas sur les falaises américaines et ça y est je glisse insensiblement… envie d’y retourner, de progresser, de découvrir les itinéraires de la légende, celle d’une autre escalade. Des envies tenaces et pressantes qui se matérialisent à la lecture des topos, à la construction d’un nouveau trip pour 2018. (le calendrier des séjours)
Je vous propose ici un retour en images et un recueil d’informations diverses sur notre rock trip en Utah, principalement à Indian Creek, site décrété Mecque de la grimpe en fissure.
L’escalade à Indian Creek
Indian Creek est localisée 50 miles au sud de Moab, sur la route de Canyonlands. Une vallée large, des vallées annexes, toutes bordées de falaises aux tons ocres, rouges, noirs et jaunes et surmontées de dômes nacrés, à perte de vue, un peu de l’ouest fantasmé. Un ranch au milieu de cette immensité, un seul. Sur près de 15 miles, on circule le long de la route 211, avec de part et d’autre les secteurs principaux, et au delà, aussi loin que porte le regard, les falaises se poursuivent, vierges.
Bienvenue au royaume de la fissure! L’escalade se déroule sur un grès superbe, pauvre en prise en dehors des fissures. Ici plus qu’ailleurs il va falloir (ré)apprendre, pas seulement à poser les protections (souvent très simple), mais surtout à grimper en coincements et pour la majorité des voies, uniquement en coincements (pieds et mains). L’apprentissage impose de réviser totalement son répertoire gestuel sous peine de chercher désespérément une aspérité à gratonner ou arquer : on verrouille ici! L’apprentissage dépendra de la capacité à sentir le verrou, à l’explorer, et aussi de la capacité à accepter la douleur que cela provoque (dans un premier temps surtout)… se laisser guider par les conseils des locaux, insister, coincer, coincer, verrouiller, avancer, coincer… (dis donc, tu viens plus aux soirées!)
Matériel :
Ici les fissures sont souvent parfaites, certains splitters ou fissures en dièdre conservent la même largeur sur plus de 25 m (voire 45 m!)… beaucoup de friends, et uniquement des friends. Des friends de toutes les tailles : en C4 de 0,3 à 4 en nombre (5 à 6 jeux est idéal, surtout sur les tailles intermédiaires 0,75 à 3; nous avions 9 jeux complets pour 2 cordées, nous avons des fois pris 12 friends au baudrier en seulement 2 tailles!), les échanges sur place entre grimpeurs sont simples et courants. Quelques micro-friends sont utiles dès que l’on essaie du plus ardu, les gros sont obligatoires (n°5 et n°6) pour se lancer dans les offwidth, au delà de ces tailles, gros moral obligatoire bien strappé le moral, léger comme le vent, insaisissable… comme le vent!
Topo :
Indian Creek – a climbing guide (Camalot Edition) , by David Bloom, 2013 – 220 p. ; tous les secteurs de Indian Creek, grandes voies incluses, presque exhaustif. Pour se repérer on trouvera une classique du secteur ou bien un nom gravé sur une dalle de grès. Pour chaque ligne, longueur, cotation (???) équipement en place si jamais, rack de friends utiles et une appréciation
– une ligne avec une étoile ici serait une incontournable sur une falaise européenne!
Pour ceux qui craignent la monotonie de l’escalade en fissure : chaque jour les innombrables lignes aux profils purs et parfaits ne peuvent qu’émouvoir le commun des grimpeurs, exciter le plus rétif et infréquentable. Ainsi le répertoire gestuel ne se limitera pas au verrou de mains (mais aussi du dulfer, du verrou de doigt, de poing, de coude de bras, de pied, de genou, des contorsions dans les fissures trop larges, des transferts improbables en compression, des arquées – si si, ça sauve parfois – et, méfiez vous des flare! méfiez-vous…). Les combats menés sont éreintants, la dépense énergétique impressionnante, à chaque voie de grands moments … et une marge de progression hallucinante : découvrir, découvrir, découvrir!
Parmi tous les secteurs, tout est beau bien sûr et les classiques qui ont fait la réputation internationale du lieu sont des « must do »… mais à explorer les secteurs méconnus, nous avons adoré ceux de la Cottonwood valley
L’escalade autour de Moab – grandes voies
Se restreindre à la grimpe ardue mais passionnante des nombreux secteurs d’Indian Creek est tout à fait envisageable. On peut être tenté tant les efforts finissent par payer, tant l’excitation que procure le sentiment de progression ressenti jour après jour stimule, tant les lignes sont belles.
Nous avons néanmoins visité d’autres lieux et c’est une évidence, bien nous en a pris! Partir pour plusieurs longueurs sur ce grès si parfait, gravir des tours isolées, se percher au beau milieu de panoramas hallucinants, s’extasier de perspectives nouvelles, passer du grognement coincé au fond d’une cheminée à la béatitude contemplative du sommet… ahhhh que c’était bon.
Près de Moab, nous sommes allées
– aux Castleton Towers (plusieurs fois pour Gab et Pierre qui ne se reposent jamais!) Classiques abordables sur Castleton ou sur le Rectory ou voies plus soutenues, à faire absolument et à re(faire), des sommets mythiques pour des journées inoubliables
– aux Lighthouse Towers, qui dominent le Colorado : une atmosphère plus confinée avec vue sur les gorges, très classe aussi et même une voie spitée pour se détendre un peu!
– à Bridger Jack dans Indian Creek : nombreuses voies de plusieurs longueurs pour un sommet multiformes, succession de gendarmes à cheval sur Indian Creek et Lavender Canyon.
Nous devrons aller aux Moses Towers (Canyonlands), aux Sixshooter…
Matériel :
Si on imagine venir pour les grandes voies, 4 jeux de Camalot, un jeu de stoppers et de nombreuses sangles permettront de (presque tout faire). Une corde à double pour gérer le tirage me semble vraiment idéale, une 2*50 suffira toujours pour les rappels.
Aux vues de ce ce que nous avons fait, des retours d’autres grimpeurs, une évidence : les cotations à Indian Creek sont sèches, ceci aussi à cause de la pureté des lignes. En grande voie, sur les desert tower, partez moins tendu, la grimpe sera souvent moins continue et nous a semblé, à cotations équivalentes, toujours moins difficiles.
Topo :
High on Moab: Moab Climbs (Paperback) – by
2017 – 144 p. ; autour de Moab, sélection de secteurs de couennes, beaucoup de grandes voies, une édition non exhaustive mais déjà très riche et très agréable et facile à utiliser
Falcon Guide Rock Climbing Utah – by
2012 – 610 p. ; la bible, une sélection malgré tout mais tant de secteurs à découvrir, idéal pour un rock trip au long cours.
Infos pratiques
S’y rendre :
Moab se situe dans la partie est de l’Utah. 3 aéroports internationaux à proximité : Las Vegas à 460 miles, Denver à 380 miles et Salt Lake City à 240 miles. Nous sommes arrivés via Denver, souvent le moins cher. De nombreuses compagnies relient l’Europe à ces trois villes à des tarifs à partir de 600 € au départ de Paris , pour 13 à 20 heures selon les escales (nous avons pris Icelandair, très courte escale à Reykjavik, le moins cher).
De Denver, possibilité de prendre le train pour Moab (en fait pour Green River avec le California Zephyr), lent mais sublime le long du Colorado. Le transfert Moab-Denver est aussi possible en avion en 1h30, pour un survol en petit pilatus des Rocky Mountains (90$).
Se déplacer :
La location d’une voiture est fortement recommandée et bon marché. Si vous êtes seul, il est facile de trouver sur place des grimpeurs et de se déplacer avec eux, une communauté ouverte et nombreuse vous accueillera (groupes FB Moab Rock climbers Utah climbers). Nous avons loué une grosse voiture (à 5) directement à l’aéroport… la route dans l’ouest sauvage est une très belle partie du voyage. Sur place, une voiture avec haute garde au sol facilite grandement l’accès à certains secteurs (sinon à pied).
Sur place :
Moab se situe à une une bonne heure d’Indian Creek, tout commerce à l’américaine, magasins de tout y compris bien sûr de matos de grimpe (site du centre d’informations locales)
Pour le loger : nombreux campgrounds à Indian Creek, comparables à des aires naturelles de camping (WC, mais pas d’eau sur place); sur un emplacement on aura souvent une zone pour le feu (bois à ramener – ramassage interdit sur place), une table… rudimentaire mais suffisant, endroits superbes. Le tarif était de 5€/nuit pour une voiture.
Sur les sites près de Moab, des campgrounds encore, à Moab, de nombreux motels. Le lazy Lizard est l’équivalent d’une auberge : des chambres chauffées, une cuisine collective, de quoi faire sa machine, se doucher (on peut passer uniquement pour prendre une douche!), le tout dans une ambiance très agréable et cosmopolite, entre mobil-home, carcasses de voiture, vieux hippies à moustaches, une valeur sure!
L’eau : amener des réserves ! à Moab, le magasin GearHeads met à disposition des robinets pour remplir ses bidons à l’intérieur. Sur place dans la creek, si vous allez au bout de la route, au Visitor Center de Canyonlands, un robinet est à dispo (eau potable, un peu salée).
La période : Nous étions sur place la deuxième moitié de novembre et début décembre et c’était idéal : temps sec, températures douces la journées (10-20°C, 20 sur le caillou ça peut faire chaud) et nuits fraiches à très fraiches (-10°C la première, oups quand même). Plus tôt en saison, à partir de mi octobre, cela sera sans problème, les « Buttress » (contreforts) offrent des parois avec toutes les orientations, en cherchant l’ombre donc si nécessaire. Pensez continental! – grosses variations jour/nuit et possibilités de tempêtes de froid (et on est à plus de 1600m).
Divers :
Moab est reconnue mondialement pour ses itinéraires de VTT (des infos ici sur Alps MTB). De nombreux loueurs offrent sur place des services de location et de navette (nous sommes partis avec Poison Spider). Nous avons parcouru partie du Whole Enchilada, 25 miles de descente inoubliable, dans des paysages toujours fabuleux; à faire si on aime ça, c’est long, ça n’est pas une journée de repos, il vous en coutera environ 100$ (location du VTT et navette).
De nombreux parcs naturels autour de Moab (Arches, Canyonlands…) et plus généralement en Utah (site des parcs en Utah): marcher dans ces espaces coupés du monde est un moment privilégié, l’imaginaire construit par toute une culture du cinéma américain jaillit devant vos yeux, on est dans le film – l’impression de tout ce séjour d’ailleurs (on a croisé les protagonistes des films des frères Coen).
Une envie de découvrir l’escalade TRAD… on commence sur les falaises de grès d’Annot
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